Alpha et Beta, quand les praticiens utilisent la théorie
1 octobre 2016 Un commentaire
Ce sont peut-être les deux termes les plus entendus dans une conversation avec un gérant d’actifs (pour peu que vous l’écoutiez ;-)).
Ces termes proviennent de la superposition d’un modèle d’évaluation théorique et d’un modèle statistique, ce qui peut engendrer des confusions.
Au départ il y a la théorie développée par H. Markowitz, Jensen et d’autres à partir des années 1950 afin de décrire la prime de risque (espérée ou réalisée selon les cas, définie comme la différence rentabilité – rentabilité sans risque) d’un actif en fonction de celle du « marché ». Le marché représente la totalité des actifs risqués. Ce modèle d’évaluation s’appelle le CAPM (ou MEDAF en français).
Très vite, M. Sharpe propose en parallèle un modèle de régression linéaire afin d’expliquer la rentabilité d’un instrument financier quelconque par la rentabilité d’un actif de référence (un indice en général). Son objectif est de simplifier l’estimation de la matrice de variance-covariance d’un portefeuille d’actifs.
Les deux approches n’ont aucun lien théorique mais, le coefficient de régression linéaire (version Sharpe) et la sensibilité d’un actif en fonction du marché dans le CAPM (version Markowitz) ont la même formule :
bêta = covariance (Rentabilité de l’actif, Rentabilité de la référence) / Variance de la référence
C’est aujourd’hui la version régression linéaire qui est utilisée, un actif pouvant ainsi avoir plusieurs bêtas différents selon l’indice de référence utilisé. En effet, dans le CAPM, la référence reste le marché au global.
Evidemment, comme toute mesure, le problème de son estimation n’est pas bien résolu : fenêtre de données, périodes glissantes, périodicité des données, modèle d’estimation (régression linéaire ou quantile, filtre de Kalman,…) car il en résulte une valeur assez instable selon la pratique de calcul retenue.
L’alpha (de Jensen) est l’écart constaté entre la rentabilité du CAPM et la rentabilité réalisée (donc sur une période choisie) et parfois par abus, l’écart de performance entre la performance du fonds et celle de la référence (i.e en fusionnant l’effet marché de l’effet spécifique). Il ne faut pas le confondre dans le modèle de régression linéaire, avec la constante (ou l’ordonnée à l’origine) souvent notée α .
Les indicateurs sont donc différents (il réside un écart de rentabilité entre celle réalisée et celle prévue par le modèle statistique). Dans les deux visions, ils traduisent la performance positive ou négative qui n’est pas expliquée par l’indicateur de référence. C’est pourquoi on le nomme souvent « alpha du gérant ». C’est la version alpha du CAPM qui est en général retenue (écart exact entre la rentabilité réalisé et celle du marché pondérée par le bêta).
Certaines manipulations, volontaires ou non, de ces notions laissent parfois croire à la création d’alpha positif alors qu’il n’en est rien.
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