Le véritable avenir de la gestion active
14 juin 2017 Laisser un commentaire
La peur du robot ?
A force d’opposer l’approche fondamentale et la gestion systématique, on ne voit pas qu’elles sont au contraire compatibles, complémentaires et bientôt indispensables l’une à l’autre. Certes, il faudra pour cela peut-être bousculer quelques esprits mais on peut essayer des les y préparer ici.
Le robot peut proposer un ensemble de service qui menacent dès aujourd’hui une partie de l’activité de CGPI : sélections d’OPC/FIA, allocations de ces fonds, passage d’ordres, suivi des risques et reporting, selon un profil du client. D’autres « systèmes » proposent du conseil en stock-picking. Pour le moment, Morgan Stanley équipe son réseau de distribution d’intelligence artificielle mais combien de temps la banque aura-t-elle besoin de conseillers ?
[ajout du 17/08/2017. Nouvel article sur la robotisation du traitement des IPO par Goldman Sachs]
Le robot s’occupe donc déjà de nos allocations. Celui qui remplacera l’analyse fondamentale est sûrement déjà né quelque part. Il remplacera d’abord l’analyste, le gérant puis peut-être même un jour le patron de boite cotée en optimisant les investissements en fonction de contraintes satisfaisant les principaux actionnaires à des horizons plus ou moins longs.
Prendre du recul
D’ici là, il faut penser autrement. L’instrument financier est un moyen, un « objet » intermédiaire, pour bénéficier de gains (algébriques) provenant de sources multiples, pas toujours toutes identifiées, souvent corrélées : la croissance, l’inflation, la confiance en l’avenir,… Lorsque l’instrument financier est confondu (dans l’esprit de l’investisseur) avec le sous-jacent réel (typiquement une action et la société dont l’action représente une part de capital), c’est alors que les risques sont les plus forts. L’analyse fondamentale porte sur la société, son développement, etc… Elle permet de comprendre les particularités de l’entreprise étudiée, sa spécificité. C’est important mais c’est incomplet. Lorsqu’il travaille ainsi, le gérant se comporte uniquement en analyste financier. Il doit penser autrement. Penser autrement car les facteurs d’influence sont multiples et ne se déduisent pas clairement d’un bilan comme le facteur psychologique, ou celui de market timing par exemple.
Une société de gestion ne peut donc plus se contenter de mettre en avant sa seule gestion fondamentale car elle négligerait un ensemble de facteurs pouvant balayer en quelques minutes un travail d’analyse de plusieurs semaines.
Les pistes de développement pour les sociétés de gestion
Dans un premier temps, une société de gestion peut rapidement faire évoluer ses processus d’investissement dans deux directions :
– recréer de l’alpha en présentant des portefeuilles ultra concentrés (25 lignes, pour respecter facilement la règle des 5/10/20/40) avec des entreprises dont les spécificités sont parfaitement connu de l’analyste. Avec plus de lignes, l’alpha est souvent détruit au profit du bêta, le risque systématique devient prépondérant. C’est d’ailleurs le cas des gestions passives qui si elle ne se cachent pas derrière un indice, doivent nécessairement gérer le risque spécifique en le diluant par une multitude de titres en portefeuille.
– prendre un indice (classique, smart,…) et ELIMINER les titres inapropriés. Son analyse fondamentale ne sert plus à sélectionner au sein d’un univers pas toujours bien défini, mais à retirer les composants les moins fiables d’un ensemble de titres bien déterminés. Une composante de construction de portefeuille pourra s’y superposer. Les risques sont activement gérés.
Dans un second temps, elle peut réfléchir à la mise en place de nouveaux processus d’investissement qui :
– la positionne dans l’air du temps
– conserve son coeur de métier qu’est l’analyse fondamentale
L’air du temps ce sont les stratégies smart beta, factor investing, …. Ces stratégies sont automatisées, des indices existent afin de les benchmarker. Ces stratégies sont fondées sur la matière première de l’analyste à savoir les éléments de bilan de l’entreprise, en les classifiant pour en choisir les titres les plus représentatifs d’une typologie bien choisie (value, growth, quality, low vol, low beta, momentum,…). La solution n’est plus très loin : les portefeuilles deviennent des assemblages de briques, les gérants pratiquent l’allocation factorielle active au sein de leur classe d’actifs et cette sélection de facteurs est créatrice d’alpha.
En termes de marketing, c’est royal, le meilleur des deux mondes, la recontre de la gestion passive et active (« pastive » ? « acsive » ?), le mélange de la gestion fondamentale et systématique (systémentale ? fondamatique ?). En termes de gestion des risques, les gérants, qui connaissent le coeur des entreprises, peuvent piloter le risque spécifique et dégager alors des performances moyennes supérieures aux gestions automatisées en évitant les déceptions.