La « justitech », la possibilité d’une justice augmentée ?

La justice s’est emparée des algorithmes afin de soulager certains processus comme la gestion administrative. La blockchain s’invite dans la certification de contrats ou d’actes notariés sans l’intervention d’un tiers, peut-être un jour dans l’union de deux personnes ? Des policiers optimisent leurs zones de surveillance ou les personnes à suivre à partir de données collectées chaque jour. Aux Etats-Unis, le logiciel COMPAS, utilisé dans deux Etats, New York et Californie, estime un risque de récidive d’un jugé coupable à partir de questions sur son passé judiciaire, ses relations, son âge ou son environnement. En Chine, le parquet de Shanghai a testé le remplacement de procureurs à partir de témoignages oraux. L’entrainement sur les crimes les plus fréquents donnerait un verdict à 97% identique à l’intervention humaine.

En France (où la loi est construite par le Parlement) chercher à prédire la justice grâce à de la technologie reviendrait à confondre le fait et le droit. L’application de la justice n’est pas l’uniformisation, mais au contraire l’adaptation au particulier. L’objectif d’une justice augmentée par des algorithmes n’est pas de prédire la jurisprudence future à partir des expériences de justice passées (au contraire des Etats-Unis où les juges construisent la loi par jurisprudence successive).

Des questions éthiques surgissent avec de forts risques de discrimination. Les criminels pourraient bien un jour être désignés avant leur forfait (ce n’est plus un simple scénario de film).  Un profil prédéterminé de récidiviste piétinera-t-il la présomption d’innocence ? On le voit, la technologie a de multiples applications dans la justice ; si certaines nous apparaissent discutables, il ne faut pas les ignorer afin de ne pas les abandonner à d’autres moins scrupuleux et de les rendre utiles (par une seule application suggestive et jamais décisionnaire) et compatibles avec notre société (en garantissant la prise en compte de l’humain).