Rapide point sur le modèle de Leibowitz
20 novembre 2022 Laisser un commentaire
On rappelle tout d’abord quelques éléments de terminologie : le surplus est défini comme l’écart entre la valeur actuelle d’un portefeuille d’actifs et la valeur actuelle des engagements, ensuite, la rentabilité du surplus est définie comme la variation du surplus relativement au passif initial, sur une période de temps donnée.
Afin de mieux intégrer les contraintes liées au passif, Martin Leibowitz (notamment dans Leibowitz M., Kogelman S., Bader L., Asset Performance and Surplus control : a Dual Shortfall Approach, Journal of Portfolio Management, 1992, voir aussi les références complémentaires) fait évoluer l’approche de Markowitz en mettant en œuvre deux contraintes :
- La probabilité que le rendement du portefeuille d’actifs (formé d’actions et d’obligations) ne doit pas varier en dessous d’un seuil avec un niveau de probabilité fixée (shortfall risk ou Value at Risk). Cette contrainte donne dans l’espace volatilité / rendement la droite du Shortfall : les portefeuilles acceptables sont situés à gauche de la droite dans le plan
- La probabilité que la rentabilité du surplus ne doit pas varier en dessous d’un seuil avec une probabilité fixée. Cette contrainte donne une courbe concave (souvent dite en forme d’œuf) sous laquelle les portefeuilles sont acceptables.
Les seuils et probabilités fixées dépendent de la capacité de l’investisseur à accepter le risque. Ces deux courbes sont illustrées sur le graphique ci-dessous. La frontière des portefeuilles optimaux est alors située sur l’arc MO.
En complément de la proportion d’actif risqué à détenir, l’approche de Leibowitz permet d’établir la duration optimale de l’actif obligataire en portefeuille.
Comme le modèle de Markowitz, les limites du modèle viennent de ses hypothèses relativement fortes (permettant de mener les calculs) :
- Normalité de toutes les distributions de rentabilités (actions, obligations, surplus, le passif étant modélisé par un portefeuille d’obligations)
- La corrélation entre le passif et l’actif obligataire est 1
- Proportionnalité de la volatilité de la composante obligataire à sa duration
- Rendement espéré identique pour l’ensemble des obligations quelque soient leurs maturités
- …
De plus, des tests pratiques montrent une sensibilité des résultats importante aux hypothèses paramétriques du modèle, prenant mal en compte l’incertitude qui les accompagne.
D’autres modèles intègrent le passif dans la résolution d’un programme d’optimisation, notamment :
– celui de Sharpe F. et Tint G. (Liabilities – A new approach, Journal of Portfolio Management, 1990) : c’est une version améliorée du modèle de Markowitz qui tient compte du passif qui évolue selon un taux (supposé suivre une loi normale) dit « croissance des engagements ». Ce modèle définit le ratio de financement comme la fraction valeur de marché des actifs sur les engagements techniques. En minimisant la variance du rendement du surplus, il se rapproche du programme d’optimisation de Markowitz. Ces inconvénients sont similaires à ceux de Markowitz et ignore la notion du duration des obligations.
– celui de Talfi M. (Organisation des systèmes de retraites et modélisation des fonds de pension, 2008) : ce modèle est une combinaison des approches de Sharpe et Tint d’une part et de Leibowitz d’autre part. La normalité des rendements est toujours présente et il réintroduit le paramètre d’aversion au risque (« à la Markowitz ») dont la calibration reste délicate en pratique.
De manière générale, tous ces modèles ne s’adaptent pas aux contraintes spécifiques du contexte ALM, réglementations ou comptabilité par exemple.
Références complémentaires
Leibowitz M., Henriksson R., Portfolio Optimization within a Surplus framework, Financial Analyst Journal, 44(2), 1988
Leibowitz M., Pension Allocation through Surplus Management, Financial Analysts Journal, 43(2)., 1987